07 mai 2021

Plaidoyer pour la tech-parité

Sara Dalmasso, vice-présidente et directrice générale internationale d’Omnicell

Selon de nombreuses études, la part des femmes, au sein des entreprises de la technologie, ne dépasserait pas 25%. Et dans la medtech, il y a fort à parier que le chiffre soit encore plus faible. Si la tech est un des parents pauvre de la parité, elle le doit sans doute à une combinaison de facteurs, historiques et culturels : la constitution des grands empires informatiques américains dans les années 60, à une époque où les femmes n’avaient pas leur place dans le monde des affaires, le tropisme masculin des écoles d’ingénieurs partout dans le monde, les représentations et les références  pop-culturelles qui associent la tech à un univers essentiellement masculin : de la figure du héros zuckerbergien à l’archétype du geek – qui renvoie à des traits de personnalité et à des comportements assez peu féminins. Tout cela ne donne probablement pas envie à des jeunes femmes d’embrasser une carrière dans la tech, qui, pourtant en matière d’attractivité est à des lieues d’autres secteurs économiques…

Les choses bougent bien sûr – de nouvelles stars féminines de la tech émergent et font progresser la cause (merci Sheryl). Surtout, le raz de marée de la digitalisation du business diversifie les débouchés et les profils recherchés. Les métiers du digital ne sont évidemment pas que des métiers d’ingénieur:  il y a pléthore de métiers créatifs en relation avec le digital : les fonctions commerciales, marketing, Ressources Humaines, finance, etc.  

Le digital est une opportunité extraordinaire puisqu’elle rebat les cartes. Le digital est partout, quel que soit le métier qu’il décrit.

Mais le décalage avec la réalité devient de moins en moins acceptable. Parce que les mentalités changent, dans la société dans son ensemble, mais aussi tout simplement parce que les clients particuliers (vous et moi) mais aussi les clients professionnels sont autant des hommes que des femmes.

Je dirige Omnicell international. Nous sommes un des principaux fournisseurs de solutions de gestion de la distribution de médicaments à travers le monde. Aujourd’hui, plus de 7 000 établissements utilisent nos solutions d’automatisation et d’analyse de données pour augmenter leur efficacité opérationnelle, réduire les erreurs de médication, délivrer de l’intelligence actionnable et améliorer la sécurité des patients.

À notre mesure nous contribuons à la digitalisation de l’industrie de la santé. Dans notre secteur, les algorithmes et les équipements de demain sont aujourd’hui pensés, développés, gouvernés presque uniquement par des hommes. Ainsi les biais de genre pourraient se retrouver directement dans la construction des équipements et des algorithmes qui les soutiennent, et par extension dans le parcours client et les interactions client-fournisseur. 

Or la majorité des usagers (nos clients) sont des femmes, notamment les corps infirmier et pharmacien!

La parité n’est pas simplement un enjeu de société et éthique, c’est une affaire de performance.

Selon une étude McKinsey, une entreprise qui met en place la parité au sein de son organisation peut augmenter sa performance de 10%. De son côté, l’Organisation Internationale du Travail a montré, en 2019, qu’une écrasante majorité des entreprises attentives à la mixité dans les postes à responsabilité, augmente ses bénéfices et attire davantage de talents.

Et à l’inverse, une entreprise qui reste sur le statu quo, perd assurément en compétitivité : la diversité des genres a des retombées positives sur l’environnement de travail, apporte de nouvelles perspectives de réflexion, améliore les processus de décision, et influe forcément sur la performance globale.

Alors, on fait comment ?

‘Small changes can make big differences”, en tech comme ailleurs. Et à notre échelle, nous voulons contribuer à faire bouger les lignes.

En rejoignant Omnicell en 2020, j’ai fait le choix de marquer une transition forte dans plusieurs domaines de gouvernance, et la parité en fait partie.

D’abord en travaillant sur notre politique de recrutement. Nous prévoyons d’ici 3 ans de parvenir à 30% d’effectif féminin au sein de l’entreprise, ce qui représente trois fois la part actuelle de femmes chez Omnicell. 

J’ai demandé aux Ressources Humaines de n’entamer aucun entretien sans la présence au moins d’une candidate. Et enfin, nous souhaitons assurer une formation continue en interne afin d’offrir les meilleures perspectives d’évolution aux femmes que nous recrutons.

Ensuite, en travaillant au plus près des écoles préparant aux métiers du numérique et de la technologie. Nous souhaitons soutenir les parcours féminins dans ces filières afin de convaincre la génération actuelle et les suivantes que les femmes ont toute leur place dans le secteur du numérique, et du numérique en santé. Nous explorons aussi toutes les opportunités d’accompagner des professionnels de santé à la reconversion aux métiers du numérique, cette double compétence étant une richesse pour l’entreprise.

Enfin en m’engageant personnellement pour porter notre approche. C’est ainsi que j’ai rejoint l’International Women Forum France, qui travaille inlassablement à promouvoir la parité et qu’Omnicell est un des partenaires des Assises de la Parité. Hier, pendant une journée, entreprises et start ups, experts, journalistes, hommes et femmes politiques, ont échangé et confronté leurs points de vue et leurs expériences pour impulser une nouvelle dynamique à la parité, à travers des ateliers et des tables rondes. Plus de 6000 personnes ont assisté à cette journée, contribuant à faire, concrètement, changer les mentalités.

Nous n’en sommes évidemment qu’au début, mais je suis fermement déterminée à faire bouger les lignes.

Faisons en sorte de faire tomber toutes les idées reçues pour construire les métiers de demain, dans le digital mais surtout des métiers non genrés. Portons tous et toutes la voix de la parité !

 

omnicell closing icon